Elevage

CONDUITE DE L’ÉLEVAGE DE LA RACE ET PERSPECTIVES D’AVENIR DE L’ÉLEVAGE
DU PETIT MÜNSTERLANDER AU SEIN DU KLM-I

(gk 21.05.2013)
Tout d’abord, j’aimerais revenir brièvement sur le passé pour aborder la question de l’élevage international du Petit Münsterlander de nos jours.

Rétrospective
Nos éleveurs ont depuis toujours constitué le pilier de notre race. En Allemagne, pays d’origine de la race, nous sommes redevables aux éleveurs d’avoir su préserver la santé et la nature de ce sympathique chien de chasse polyvalent depuis plus de 150 ans.

Dès 1921, le Petit épagneul de Munster rencontra de plus en plus de succès à l’étranger. Cette progression prit un nouvel essor après la deuxième guerre mondiale. Dans la deuxième moitié du siècle dernier, suite à des initiatives privées, des clubs furent créés dans plusieurs pays européens ainsi qu’en Amérique du Nord dans le giron desquels l’élevage du Petit Münsterlander a été pratiqué. Les éleveurs, dans leur grande majorité, exerçaient dans le respect du standard F.C.I. du PEM, des traditions et des spécificités des pratiques de la chasse de leurs pays.

Depuis 1968, la Fédération Cynologique Internationale ((F.C.I.) s’occupe sur le plan mondial du standard de notre race et veille à l’application de directives identiques au niveau international. Malheureusement, le standard n°102 ne contient essentiellement que les caractéristiques d’apparence extérieure (morphologie et pelage). Concernant les aptitudes naturelles et les caractéristiques au travail, le standard n°102 mentionne uniquement que le PEM est un chien polyvalent qui ne doit avoir peur ni du coup de feu ni du gibier. Les particularités qui caractérisent le chien de chasse polyvalent n’y figurent pas.

Situation actuelle
Les organismes officiels nationaux de PEM s’orientèrent d’après le standard F.C.I. du Petit épagneul de Munster. Ainsi a pu être conservée, sur le plan mondial, l’apparence extérieure de la race. Cela n’est pas du tout pareil pour les aptitudes naturelles au travail.

Ici, la FCI n’a pas proposé à ses membres les mêmes objectifs pour l’élevage. Elle laisse à ses pays membres le soin de décider de mener l’élevage comme ils le souhaitent, en se basant sur le travail ou des caractères particuliers. Que les parents aient été présentés avec succès à une exposition d’élevage (morphologie et poil) et ne soient pas agressifs, sont les objectifs communs appliqués par tous les pays.

Dans ce cas, les chiots obtiennent déjà le pedigree F.C.I. Dans beaucoup de pays sont déjà organisées des épreuves pour juger les aptitudes naturelles au travail. Ces épreuves testent très souvent des points particuliers liés aux pratiques locales de la chasse pour lesquelles les chiens de chasse sont utilisés. Les épreuves de travail d’évaluation des aptitudes naturelles ne sont malheureusement pas la condition pour l’obtention du pedigree F.C.I., universellement reconnu, à l’exception de l’Allemagne.
Dans beaucoup de pays, des examens de santé supplémentaires sont pratiqués, par exemple pour les hanches ou pour les yeux . En Suisse, un examen spécifique de caractère est même exigé.

Aujourd’hui, environ 10 000 personnes ont adhéré aux différents clubs nationaux. Mis à part en Allemagne, dans d’autres pays membres de la F.C.I., des éleveurs, qui ne sont pas adhérents au club national, peuvent obtenir des pedigrees F.C.I. pour leurs chiots. Le nombre de ces éleveurs est très variable d’un pays à l’autre. En gros, 3 500 à 4000
chiots sont enregistrés annuellement dans les pays membres de la F.C.I. . 2 500 chiots proviennent d’élevage de chasse, qui, soit dit en passant, ne sont pas élevés à partir de critères identiques au niveau international.

Cela correspond en général à une population effective de 1 200 reproducteurs (lices et étalons). Actuellement, au niveau international, on compte environ 20 000 à 25 000 PEM issus d’élevages reconnus par la F.C.I. . Dans le pays d’origine de la race, le cheptel de reproducton est constitué d’environ 200 PEM qui produisent exclusivement des chiots issus de lignées de travail.

Ces chiffres démontrent qu’à l’avenir, il sera de plus en plus difficile de conserver pour le PEM le profil de chien de chasse polyvalent. Actuellement, de nombreuses petites populations profitent du caractère génétique très marqué du noyau de la race, mais la question essentielle qui se pose est « Combien de temps cela durera-t-il encore? ».

Profil de travail du PEM classique
Depuis 150 ans, le classique PEM est élevé comme un chien de taille moyenne, de bonne santé, passionné à la chasse avec de multiples aptitudes pour le travail avant et après le coup de feu en plaine, au bois et à l’eau. Le PEM classique est produit comme « un généraliste » qui pourra se spécialiser en fonction des besoins. En général, pour être autorisé à participer à l’élevage, un niveau minimum est exigé pour le nez, le rapport, la quête, l’arrêt, le pistage, le plaisir à travailler à l’eau comme la maniabilité. Les PEM ne doivent être ni muets ni clabauds et doivent être dotés d’un caractère équilibré. Ces aptitudes au travail et traits de caractères sont jugés depuis 1928 dans le pays d’origine de la race, au printemps et en automne, lors d’épreuves de travail qui donnent accès au droit à reproduire.

Grâce à ces aptitudes, les classiques PEM peuvent être utilisés dans des circonstances différentes. Ils travaillent avec assurance à la chasse au lièvre, les nuisibles et le gibier à plume, ils traquent et rapportent le gibier d’eau, ils sont intelligents, autonomes et sont des auxiliaires fidèles à la chasse aux sangliers, chevreuils, gibier rouge et beaucoup d’autres espèces de gibiers au bois. Ils trouvent et suivent le gibier en compagnie de leur maître lorsque le gibier se dérobe après le coup de feu et amènent le chasseur au gibier blessé ou tué.

Dans les 150 dernières années, les conditions à la chasse ont beaucoup changé dans tous les pays. Le classique PEM est resté le même en raison de sa polyvalence. Il reste utilisable sur tout type de gibier, il travaille en solo et également en meute avec les autres chiens. En raison de ses nombreuses aptitudes, il peut être spécialisé, par exemple pour la chasse en plaine ou la recherche au sang et aussi en montagne où je l’ai déjà fait travailler avec succès sur petit coq, grand tétras et chamois.

Le PEM est né pour chasser. C’est le meilleur compagnon du chasseur. Il aime le contact avec les hommes et se sent aussi bien à la maison, au sein de sa « famille », que sur le terrain, qu’il pleuve ou qu’il vente. Les temps ont changé, pas le Petit Münsterlander. C’est pourquoi il a gardé une santé robuste qu’il a héritée de ses aïeux, son caractère spécifique bien ancré et son profil de « bonne à tout faire ».

Où en-est aujourd’hui l’élevage international du Petit Münsterlander?
Des épreuves comparables d’évaluations des aptitudes naturelles, comme ils en existent en Allemagne, sont également pratiquées en Autriche, en République Tchèque et en France. A côté de cela, en Europe, il n’y a que très peu de pays qui pratiquent l’élevage du Petit Münsterlander en s’appuyant sur une règlementation qui prend en compte les aptitudes naturelles.

Parce qu’en Allemagne le club allemand détient exclusivement l’attribution des pedigrees F.C.I. et veille scrupuleusement à ce que l’élevage soit pratiqué dans le respect de la règlementation allemande du PEM, ainsi, dans le pays d’origine de la race le contingent de PEM issu de lignées de travail est le plus important au niveau européen.

Tous les PEM de par le monde sont issus de l’élevage allemand. Dans les pays voisins, depuis plusieurs générations, se sont constituées des petites populations de PEM qui se sont développées plus ou moins rapidement. Ces effectifs avaient, et ont toujours encore, un besoin essentiel de sang neuf car la base génétique était insuffisante pour éviter les risques liés aux maladies héréditaires et à la consanguinité.

Ce rafraîchissement génétique venait régulièrement de l’Allemagne et plus tard également d’autres pays. Aujourd’hui on trouve également en Allemagne d’excellents PEM issus de clubs étrangers qui ont participé avec beaucoup de réussite à l’élevage. En 2012, 25 étalons appartenant à des propriétaires allemands ont été utilisés pour l’étranger. Dans la même année, 74 étalons ont sailli en Allemagne.

Ces chiffres démontrent que le capital génétique du PEM classique devient à la longue toujours plus petit. Pour un cheptel d’élevage de moins de 40 reproducteurs par an, il est difficile de conserver, à lui seul, un potentiel d’élevage qui puisse assurer à long terme la santé et les caractéristiques spécifiques à la race. Le noyau de la race, bien que consolidé par de nombreuses générations, sera fragilisé sans la pratique d’une politique d’élevage raisonnée et sérieuse. Nous devons nous rendre à l’évidence que pour préserver le PEM, tel que nous le connaissons aujourd’hui, il faut un potentiel génétique international fort et élargi.

Seul le PEM « généraliste » ou « bonne à tout faire » peut également être légèrement spécialisé dans un domaine particulier de la chasse alors que le PEM élevé uniquement pour un travail spécifique, perdra à la longue une partie de son potentiel génétique à large spectre. Ce qui aura évidemment des conséquences néfastes sur son caractère et sa santé. Ces problèmes apparaissent insidueusement, à petits pas : mettre alors en place des stratégies d’élevage pour y remédier devient dans beaucoup de cas impossible.

Beaucoup de PEM sont utilisés pour l’élevage dans bien des cas où le côté sportif, voire commercial, est privilégié par rapport à la chasse. Par exemple, dans certains règlements nationaux il est précisé que le chien ne doit pas entrer en contact avec le gibier, que le criant est une faute. Dans ces cas, les exigences demandées lors de ces épreuves n’ont plus rien à voir avec les aptitudes naturelles mais dépendent du dressage et de l’expérience.

Ce qui a pour conséquence de ne pouvoir valider les performances qu’à un âge plus avancé. Dans ce cas, du fait que les résultats obtenus aux épreuves représentent des critères importants pour une lignée de travail, les aptitudes naturelles seront prises en compte trop tardivement et nuiront à la longue à la consolidation de l’arrêt, au travail en plaine, à la perte d’autonomie et du plaisir à travailler en général. La perte du criant, comme on a déjà pu le constater, aura une incidence sur le caractère et le profil de chien de chasse pratique polyvalent qui caractérise le PEM.

Ces risques menacent déjà maintenant l’élevage classique du PEM comme une race pure. Des centaines de PEM sont concernées.

L’élevage international ne peut supporter sans risque que des profils différents de PEM soient produits dans un espace restreint. Pour cette raison, il faudra mettre en place et développer des stratégies communes efficaces. La devise pourrait être : autant de liberté possible que de coordination internationale nécessaire.

Projets pour l’avenir
1. Un élevage de travail du PEM doit être impérativement reconnu par les pays membres de la F.C.I. et figurer en tant que tel sur les pedigrees. Ce qui ne signifie pas qu’il ait fallu modifier le standard valable actuellement. La définition du PEM telle qu’elle figure dans le standard comme chien de chasse polyvalent a été soulignée pour que cela soit concrètement mieux pris en compte dans la pratique de l’élevage. Il n’est pas admissible que n’importe quel éleveur ou n’importe quel pays membre de la F.C.I., puisse interpréter différemment « un chien de chasse polyvalent » et nuise de ce fait à l’élevage de la race.

2. Dans le standard F.C.I. les aptitudes au travail devront être définies clairement pour qu’aucun pays membre de la F.C.I. ne puisse refuser des épreuves ayant pour objectif d’évaluer les aptitudes naturelles. Le pays d’origine de la race est seul compétent pour actualiser le standard, le KlM-I , lors de l’AG 2012 a fait des propositions de modifications à destination du club allemand. Ces propositions devront être étudiées au cours de la prochaine AG du club allemand qui les soumettra à la VDH qui devra alors les traîter et les transmettre à la F.C.I. .

3. Les associations nationales (Kennelclubs) qui ont la charge d’attribuer les pedigrees de la F.C.I. doivent tenir compte que les caractéristiques de travail figurant dans le standard doivent être validées par des épreuves nationales. Les chiens qui auront réussi ces épreuves porteront alors sur leur pedigree la mention « Issu d’un élevage de travail » pour les distinguer d’un « élevage conventionnel ». Ceci ne sera possible qu’avec l’accord des clubs nationaux de PEM et des organismes de tutelle. Le KlM-I travaillera à ce projet. La solution intermédiaire pourrait être l’attribution du « Certificat du KlM-I » car le chemin risque d’être long avant que tous les organismes de tutelle dans les différents pays acceptent cette proposition. D’autre part, sous certaines conditions, certains élevages confirmés de travail pourraient profiter de l’appellation attribuée par le KlM-I ‘ »Issu d’élevage de travail ».

4. La Commission internationale d’élevage du KlM-I aura pour mission de trouver des idées, et de les développer, pour la mise en place de stratégies d’élevage pertinentes et créer une organisation internationale pour l’élevage. Ce concept devra encore être étudié et validé lors d’une prochaine réunion. Dans ce cadre, on pourrait envisager deux niveaux : élite et de base. Les chiens ayant réussi à ces épreuves pourraient obtenir une distinction spécifique. La même chose pourrait être valable pour les élevages. Nous avons besoin de l’appui des éleveurs et des conducteurs pour la conduite de l’élevage international. Nous devons assurer un soutien sans faille à cette mission. Il sera également très important de mettre en place et développer des règles communes concernant la pratique des sailies par delà les frontières. Il faudra également encourager la création d’une base génétique saine et élargie. La réunion de la Commission internationale est prévue au courant de l’été 2013.

5. Des entretiens devront avoir lieu avec les différents clubs nationaux pour savoir concrètement comment sont pratiquées les épreuves pour tester les aptitudes naturelles, si toutes les particularités d’un élevage de chien de chasse polyvalent sont prises en compte et les problèmes qui peuvent se poser. Les épreuves ne sont habituellement pas gérées par les clubs nationaux du PEM, c’est pourquoi des discussions doivent être engagées. Le chemin sera long et juché d’obstacles pour que soit accepté au sein du KlM-I le principe de pratiquer l’élevage du PEM comme chien de chasse polyvalent. Si nous voulons atteindre cet objectif, nous serons tous amenés au sein de nos organisations de travailler assidûment, en faisant preuve de patience, en collaboration étroite avec les associations de tutelle pour arriver à un résultat tangible. Le club du PEM du Danemark, avec l’appui du club allemand et du KlM-I, a commencé à mettre en pratique ces recommandations.

6. La communication, les échanges et l’organisation d’épreuves communes sont les facteurs qui permettront un travail fructueux au niveau international. Les recherches vétérinaires ont fait depuis des années de grands progrès dans la génétique et la lutte contre les maladies. L’étude du comportement est une science qui progresse continuellement et qui peut être source d’inspiration pour le KlM-I. Les juges de travail comme les conducteurs peuvent également profiter des expériences pratiquées à l’étranger. Chacun peut apprendre de l’autre et cela encourage la solidarité. Des obstacles de plus en plus importants peuvent se présenter en Europe, aux chasseurs et conducteurs de chiens, mais ayons à l’esprit que l’union fait la force. Les épreuves tests d’IMP qui se sont déroulées en Autriche et en Allemagne ont donné beaucoup de satifsfactions. Ce sont de bons exemples pour démontrer la coopération entre juges de travail, conducteurs et amateurs de pays européens différents.

7. La pratique de l’élevage de travail du PEM au service de la chasse au niveau international doit devenir un symbole fort et de qualité. Elle doit occuper une place de plus en plus importante auprès des éleveurs et des conducteurs et gagner en valeur marchande. Le PEM, les éleveurs, ainsi que l’éthique de la chasse ne pourront y trouver que leur compte. Cela vaut la peine de coopérer et de diffuser l’information.

En Allemagne, nous avons depuis de nombreuses générations un dicton qui dit : « Produit moins mais mieux! ». Ce dicton a fait ses preuves dans la conduite de l’élevage du PEM tel que l’on connaît et qu’on souhaite garder. Il pourrait également s’appliquer, en raison de la constante et rapide croissance de notre race, à l’ élevage du PEM sur le plan international.